307e session du Conseil d’administration

Une Commission d’enquête du BIT souligne le rôle du processus de réconciliation et d’apaisement dans la garantie des droits de la liberté syndicale au Zimbabwe

Une Commission d’enquête du BIT a récemment publié un rapport intitulé «Vérité, réconciliation et justice au Zimbabwe». La commission d’enquête indépendante, composée d’experts indépendants de haut niveau, a été mandatée pour examiner l’observation par le Zimbabwe de la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (n° 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, suite aux plaintes déposées par 13 délégués travailleurs et 13 délégués employeurs à la 97e session de la Conférence internationale du Travail de juin 2008.

Communiqué de presse | 29 mars 2010

GENÈVE (Nouvelles du BIT) – Le Conseil d’administration du BIT a pris note du rapport de la Commission d’enquête le 25 mars 2010. Lors de cette session, le gouvernement du Zimbabwe était représenté par Mme Paurina Mpariwa, ministre du Travail et des Affaires sociales qui a reconnu que son gouvernement avait reçu le rapport et pris note de ses recommandations. Elle a indiqué qu’une réponse écrite complète serait fournie au Conseil d’administration dans les délais impartis par la Constitution de l’OIT et a remercié l’OIT du soutien technique apporté par le passé, espérant qu’il se poursuivrait à l’avenir.

La Commission a relevé qu’il y avait eu des violations systématiques voire systémiques des conventions n° 87 et 98 dans le pays. Dans son rapport, elle a noté que les membres et les employés des syndicats étaient systématiquement visés, en particulier dans les régions rurales, par des faits de violence, des détentions arbitraires, le recours habituel à la police et à l’armée contre les grèves, une ingérence fréquente dans les affaires syndicales, une discrimination antisyndicale au travail, dans ce qui apparaît comme une tentative calculée d’intimider et de menacer les membres du Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZTCU). Elle s’est également dite particulièrement préoccupée de l’incapacité à garantir l’indépendance judiciaire et la primauté du droit, ce qui se traduit par une situation d’impunité pour les auteurs de ces atrocités. Cette conclusion était fondée sur ce que la Commission a considéré comme un schéma manifeste d’arrestations, de détentions, d’actes de violence et de torture des dirigeants et des adhérents des syndicats commis par les forces de sécurité, ce qui laisse supposer qu’il y avait un plan coordonné poussant les forces de sécurité à agir ainsi.

La Commission a entrepris deux missions au Zimbabwe en mai et août 2009 au cours desquelles elle a rencontré plus de 300 personnes, y compris des fonctionnaires gouvernementaux, des membres et des responsables des syndicats et des organisations patronales, ainsi que des représentants des organisations de la société civile.

«En se tournant vers l’avenir, dans un esprit de rétablissement et de raffermissement de la confiance», elle pense que la mise en œuvre de ses recommandations serait «utile pour le Zimbabwe». La Commission recommande donc:

  • que les textes législatifs pertinents soient mis en conformité avec les conventions n° 87 et 98;
  • que toutes les pratiques antisyndicales – arrestations, détentions, violence, torture, intimidation et harcèlement, ingérence et discrimination antisyndicale – cessent avec effet immédiat;
  • que les institutions nationales, en particulier la commission des droits de l’homme du Zimbabwe et l’organe pour l’apaisement et la réconciliation nationale, s’emparent à leur tour du processus enclenché par la Commission qui a permis d’auditionner les gens;
  • que le personnel jouant un rôle clé dans le pays puisse recevoir une formation sur la liberté syndicale et la négociation collective, les libertés civiles et les droits de l’homme;
  • que le règne du droit et le rôle des tribunaux soient renforcés;
  • que le dialogue social soit renforcé en reconnaissance de son importance dans le maintien de la démocratie;
  • Et que l’assistance technique de l’OIT dans le pays se poursuive.

La Commission d’enquête conclut son rapport en rappelant qu’au fil de son travail, elle a été témoin de la crise que traverse le pays. Elle a perçu le défi auquel est confronté le Zimbabwe pour construire «un pont entre le passé marqué par la division et les tensions sociales et un avenir de justice et de paix». La Commission a souligné que le mouvement vers la vérité, la réconciliation et la justice devait être soutenu et elle espère que son rapport contribuera à ce processus.

Les trois membres de la Commission désignés en novembre 2008 par le Conseil d’administration du BIT étaient: le juge Raymond Ranjeva, ancien vice-président de la Cour internationale de justice, le Dr Evance Kalula, professeur de droit (emploi et sécurité sociale) et directeur de l’Institut du développement et du droit du travail de l’Université du Cap et le Dr Bertrand Ramcharan, ancien Haut Commissaire adjoint par intérim de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies et Sous-secrétaire général des Nations Unies.